La traición de Ucrania sería la sentencia de muerte del proyecto europeo

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4 de enero de 2025


Dans une tribune au « Monde », un collectif de personnalités et de citoyens parmi lesquels Daniel Cohn-Bendit, Ariane Mnouchkine, le général Vincent Desportes et Adam Michnik, appelle à la mise en place d’une coalition entre Etats européens accordés sur quelques mesures vitales pour un pays qui défend sa liberté et protège les nôtres.

Le Monde

L’association Jean Monnet est signataire cette tribune et représentée par Olivier Védrine, administrateur.

L’Ukraine vit des heures angoissantes. L’armée russe, forte d’un budget militaire de 106 milliards d’euros, qu’elle veut porter à 135 milliards en 2025, poursuit son invasion au prix de dizaines de milliers de morts et de la destruction systématique des infrastructures vitales de l’Ukraine : ses centrales énergétiques, ses hôpitaux, ses usines.

Malgré la résistance héroïque des Ukrainiens, elle gagne du terrain grâce aux demi-mesures et aux retards de l’aide apportée par leurs alliés, qui se gardent bien de désigner la seule issue admissible de cette guerre : le retrait de la Russie dans ses frontières.

Paralysés par le « chantage au nucléaire » de Vladimir Poutine, Joe Biden et les dirigeants occidentaux ont livré à contretemps des armements en quantité et de portée limitées, sans procurer à l’Ukraine les moyens de la victoire. Préoccupés avant tout par le souci de ne pas concourir à une « escalade », ils ont laissé le Kremlin franchir successivement toutes les étapes de la surenchère militaire, jusqu’à l’arrivée ces derniers jours de 10 000 soldats nord-coréens, couronnée par l’emploi de charges chimiques et d’un missile balistique hypersonique.

Tétanisés par les rodomontades de Donald Trump, les gouvernements européens se préparent-ils mezza voce à accepter, avec un lâche soulagement, que la nouvelle administration américaine négocie un accord de cessez-le-feu au détriment de la volonté ukrainienne ?

Contre la Géorgie, la Moldavie ou les pays baltes

La trahison de l’Ukraine signerait l’arrêt de mort du projet européen : triomphant aujourd’hui, Poutine reprendrait dans deux, cinq ou sept ans ses guerres de conquête contre l’Ukraine, mais aussi contre la Géorgie, la Moldavie ou les pays baltes. L’ensemble du continent glisserait vers l’abîme. Notre sécurité, nos libertés et nos valeurs sont directement menacées. Il faut donc agir, vite.

L’OTAN est suspendue au bon vouloir de la Maison Blanche. L’Union européenne (UE) se heurte à l’indécision et à la pusillanimité de certains chefs d’Etat et de gouvernement, et au double jeu du premier ministre hongrois Viktor Orban. C’est pourquoi, nous appelons à la mobilisation de tous les citoyens européens : si l’OTAN ne prend pas rapidement ses responsabilités pour inviter l’Ukraine à rejoindre l’Alliance atlantique, il faut que se mette en place une coalition des Etats européens volontaires – qu’ils soient ou non membres de l’UE (comme le Royaume-Uni ou la Norvège).

Cette coalition pourrait s’accorder sur un ensemble de mesures :

– assurer le financement de l’armement nécessaire, réclamé par Kiev, en confisquant et en transférant à l’Ukraine les 210 milliards d’euros [environ 202 milliards d’euros] d’avoirs de la Banque centrale de Russie actuellement bloqués en Europe (le prêt en cours de l’Union européenne pouvant, quant à lui, reposer sur d’autres garanties). Non seulement cette confiscation est autorisée par le droit international, mais l’urgence la justifie : les besoins du pays ruiné par la guerre d’agression, évalués par la Banque mondiale à 483 milliards de dollars au 1er janvier 2024, s’élèvent aujourd’hui à près de 800 milliards de dollars, selon le gouvernement ukrainien. Cela raffermirait aussi la souveraineté collective européenne sur la scène internationale ;

Présence défensive

– protéger le ciel et la frontière nord de l’Ukraine. En autorisant les Ukrainiens à frapper en Russie, avec les armes que nous leur procurons, tous les sites militaires d’où partent les attaques de Moscou ; en fournissant une quantité significative de batteries et de vecteurs antiaériens, afin d’arrêter la destruction des infrastructures civiles ; en neutralisant avec le concours de nos forces aériennes et antiaériennes, depuis l’espace européen, les missiles et drones à moyenne et longue portée lancés contre les villes ukrainiennes ; en envoyant, enfin, des forces militaires prépositionnées, réunies par la coalition des pays volontaires.

Chargées de missions de logistique (formation, maintenance et réparation, déminage, soutien médical et sanitaire), elles assureraient en outre la surveillance de la frontière de l’Ukraine avec la Biélorussie. Cela permettrait aux troupes ukrainiennes immobilisées sur ces positions de rejoindre le front. Cette présence défensive serait la meilleure réponse à l’implication aux côtés des forces russes de troupes du régime totalitaire de Kim Jong-un et le signe de notre détermination, afin de dissuader Poutine d’aller plus loin ;

– refuser tout accord de cessez-le-feu qui ne prenne pas en compte la dimension humaine (et pas seulement territoriale) de l’invasion russe : aucun Ukrainien ne doit être retenu contre son gré en Russie ou dans les territoires occupés. Le retour en Ukraine des populations déportées par l’armée russe, dont des dizaines de milliers d’enfants kidnappés, doit être non négociable. D’autre part, tout accord de cessez-le-feu doit prendre en considération la sécurité de l’Ukraine, à laquelle ne peut être imposé le statut d’Etat démilitarisé ou neutre. Les pays membres de l’OTAN doivent l’inviter à les rejoindre, comme le demande Kiev, et étendre la protection de l’Alliance aux territoires sous contrôle ukrainien dès 2025.

Quoi qu’en dise la propagande du Kremlin, aucune de ces mesures n’implique d’entrer en guerre avec la Russie. Leur coût est limité. Elles sont vitales pour un pays qui défend sa liberté et protège les nôtres. C’est l’heure de L’Europe : ne trahissons pas l’Ukraine !

Premiers signataires : Daniel Cohn-Bendit, ancien député européen ; Vincent Desportes, major général de l’armée de terre (2S), ancien directeur de l’Ecole de guerre ; Stephen Fry, écrivain, réalisateur et acteur (Royaume-Uni) ; Michel Hazavanicius, cinéaste ; Agnieszka Holland, cinéaste (Pologne) ; Jonathan Littell, écrivain et cinéaste ; Denis MacShane, ancien ministre des affaires européennes (Royaume-Uni) ; Adam Michnik, rédacteur en chef de Gazeta Wyborcza (Pologne) ; Ariane Mnouchkine, metteure en scène et directrice du Théâtre du Soleil ; Sylvie Rollet, professeure émérite, présidente de Pour l’Ukraine, pour leur liberté et la nôtre ! ; Karl Schlögel, historien, professeur émérite, European University Viadrina (RFA) ; Volker Schlöndorff, cinéaste (RFA) ; Marc Thys, lieutenant-général (R), aide de camp honoraire du roi des Belges (Belgique) ; Olivier Védrine, administrateur de l’Association Jean-Monnet ; Michel Yakovleff, général (2S) de l’armée de terre.

Retrouvez la liste complète des signataires ici.

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