A necessidade de defender a Ucrânia está indissociavelmente ligada à necessidade de defesa europeia

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5 Julho 2025


La guerre en Iran, le conflit à Gaza, ont laissé au second plan la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine depuis février 2022. Pourtant la guerre n’est pas terminée. Chaque jour, chaque nuit, ce sont des centaines de drones et missiles qui détruisent l’Ukraine et tuent ou blessent sa population.

Le Center for Strategic and International Studies a publié, mardi 3 juin, un nouveau bilan des morts et blessés parmi les combattants russes et ukrainiens. Sans chiffre officiel, le think tank américain estime le nombre de victimes, depuis le 24 février 2022, à 1 million côté russe (dont 250 000 morts) et 400 000 côté ukrainien (dont 60 000 à 100 000 morts), pays quatre fois plus petit.

C’est de loin la guerre la plus meurtrière en cours dans le monde et le président russe, Vladimir Poutine, ne marque aucune volonté de l’arrêter ou même la ralentir.

Il y a donc la nécessité de poursuivre et accentuer l’aide militaire européenne qui est encore insuffisante face aux besoins. La supériorité matérielle russe (tanks, canons, missiles, etc…) est encore importante du côté russe et l’industrie russe est mobilisée pour une guerre longue.

La France, quoiqu’elle dise n’est pas au premier rang des donateurs d’armes. L’UE est passée, elle, devant les Etats-Unis. Selon la source Kiel Institute (jusqu’en février 2025), les États-Unis ont accordé ~114 milliards € (≈ 120 milliards $) mobilisés au total alors que l’Union européenne (UE + États membres) : ~127–148 milliards € déjà mobilisés, sans compter les nouveaux volets futurs (Facilité, prêts), ce qui porte l’aide potentielle au-delà de 220 milliards €.

Point positif : c’est la première fois que l’Europe dépasse les États-Unis en aide militaire dans un conflit majeur, y compris pendant la guerre en ex-Yougoslavie ou en Afghanistan. Est-ce que cela veut dire un basculement stratégique ? Début d’une autonomie stratégique européenne ? La question est à surveiller de près.

Dans le court terme, il y aura une Conférence le 10 juillet prochain sur la reconstruction de l’Ukraine, à Rome (jusqu’au 11). Il faut intensifier l’effort économique et financier, envisager l’avenir. Mais d’abord gagner la guerre. C’est une évidence tant on ne peut faire aucune confiance à Vladimir Poutine et ses nombreux sbires.

Quels enseignements de la guerre ?

C’est une boucherie, on l’a dit : 1 million de Russes tués ou blessés rapportait récemment le Monde. Plusieurs centaines de milliers d’Ukrainiens probablement.

Guerre humaine, la guerre est devenue très largement technologique. C’est la Guerre des drones. On pensait avant le conflit aux grands drones type Reaper américain, ce sont en fait des petits drones peu coûteux : drones kamikazes FPV par exemple, qui sont utilisés massivement par les deux camps, coûtant parfois moins de 1 000 € l’unité.

Drones aériens mais aussi navals ukrainiens qui interdisent désormais la Mer Noire à la marine russe qui se terre à l’est sur la côte orientale.

Guerre de l’artillerie, avec notamment le calibre 155 mm, mais aussi divers types de lance-missiles.

Missiles divers hypersoniques ou balistiques côté russe, que Moscou utilise abondamment pour écraser les populations selon une stratégie de la terreur qui rappelle l’Allemagne nazie en 1940-1941 face à la population britannique.

Quels enseignements pour l’UE ?

Dans ces domaines l’UE a des déficits capacitaires importants. Les pays de l’UE  manquent notamment très largement de :

– munitions

– drones adaptés

– défense anti-aérienne…

Mais aussi de chars de combats, de véhicules blindés, de missiles longue portée, etc…

Il y a surtout un déséquilibre préoccupant par rapport à la Russie.

Selon un rapport de l’Institut Bruegel et de l’Institut Kiel : en parité de pouvoir d’achat (en tenant compte des prix), le budget de défense de la Russie passe de 146 milliards de dollars à 461 milliards de dollars, soit l’équivalent pour la défense à celui de l’UE et du Royaume-Uni ensemble.

Il existe des différences dans les volumes de production d’armes entre la Russie et l’UE. 1 800 chars par an en Russie contre 50 dans les 4 grands pays européens (Allemagne, France, Pologne, Royaume-Uni). Il faudrait donc multiplier la production par trois à six selon les cas si l’on voulait réduire de façon substantielle l’écart par rapport à la Russie d’ici à 5 ans !

En 2024, les 4 grands pays disposaient de 1627 chars contre 2400 pour la Russie.

En cas de guerre avec la Russie actuellement le front européen pourrait donc s’effondrer.

Idem dans d’autres domaines : pièces d’artillerie, véhicules de combat d’infanterie, défense aérienne…

Nécessité d’une défense européenne

On avait organisé un colloque en 2013 à l’Association Jean Monnet sur la question.

Déjà on pointait les lacunes capacitaires, qui existent encore maintenant, notamment dans la logistique et le transport aérien militaire, en plus de celles évoquées plus haut (munitions, drones…). Heureusement l’avion de transport A400 M vient d’être sauvé tout récemment de la disparition par une décision franco-espagnole d’assurer la poursuite d’au moins 8 commandes minimum par an.

Mais l’A400 M ne peut emporter que 35 tonnes de fret contre 130 pour un Lockheed C5-M américain ! Il y a là un retard encore à combler…

Il y a aussi le problème d’avoir une force européenne déployable. Lors du sommet franco-britannique qui s’est tenu à Saint-Malo les 3 et 4 décembre 1998, les chefs d’État et de gouvernement du Royaume-Uni et de la France s’accordaient sur la nécessité de doter l’UE d’une capacité autonome de décision et d’action, appuyée sur des forces militaires crédibles, afin de pouvoir répondre aux crises internationales lorsque l’Alliance atlantique n’est pas engagée.

Depuis rien ou presque n’a été mis en place. Or l’OTAN sous la pression américaine vacille.

Dans le colloque, on avait indiqué qu’à terme une force européenne de 60 000 hommes devrait pouvoir être déployable en quelques mois. On en est loin.

La France peut jouer un rôle leader en la matière, elle qui a déployé sur les théâtres d’opérations extérieurs des milliers de soldats, au prix du sang. Ces morts, on ne peut les citer tous.
Donnons-en un : Le caporal-chef Jean Nicolas Panezyck, mort en opération pour la France en Afghanistan le 23 août 2010 et croix de la valeur militaire avec palme de bronze, disparu déjà pour une juste cause. Il faudrait citer les milliers d’Ukrainiens qui sont morts eux-aussi pour une juste cause… La liste est longue.

Autre sujet : L’industrie européenne de défense n’existe pas ou peu. Les freins à une consolidation sont nombreux : souveraineté nationale, compétition industrielle, lenteur des programmes conjoints (ex. SCAF franco-allemand). Ce sont des industries nationales : il y a ainsi 6 constructeurs de chars nationaux, trois motoristes d’avions, trois d’avions de combat… c’est mieux dans le naval avec deux grands acteurs : Fincantieri et Naval Group.

Heureusement, il y a des espoirs

Après le Brexit le Royaume-Uni se rapproche de l’UE. Il y a déjà le rapprochement franco-britannique par les traités de Londres ou accords de Lancaster House sont les deux traités militaires signés lors du sommet franco-britannique de Londres, à Lancaster House, par le président français Sarkozy et le Premier ministre du Royaume-Uni Cameron le 2 novembre 2010.

Les deux gouvernements avaient décidé de créer une force expéditionnaire commune interarmées (en anglais, Combined Joint Expeditionary Force – CJEF). Le but de cette force était de permettre, d’ici 2016, de disposer d’une capacité conjointe pouvant être engagée dans des opérations bilatérales, mais également dans le cadre d’une coalition internationale (OTAN, UE ou ONU).

Heureusement pour nous, le Royaume-Uni est très engagé dans la défense de l’Ukraine. C’est important car avec la France, c’est l’autre puissance nucléaire et navale de l’Europe ! La dissuasion nucléaire sera-t-elle élargie aux partenaires européens ? La question revient sur le devant de la scène.

Il y a aussi le revirement allemand qui va consacrer des centaines de milliards d’euros à la défense.

Enfin la commission européenne qui en mars 2025 a lancé le plan « Réarmer l’Europe », chiffré à 800 milliards d’euros. 150 milliards d’emprunts européens, les 650 autres devant être fournis par les différents Etats, ce qui est loin d’être gagné vu le contexte budgétaire notamment de la France…

Toutefois  l’Institut Bruegel et de l’Institut Kiel estiment dans un rapport que les efforts de « Réarmer l’Europe » pourraient être insuffisants au regard des efforts de réarmement nécessaires.

Enfin au sommet de l’OTAN de juin dernier, les pays membres se sont engagés à porter leur effort de défense à 5 % du PIB d’ici à 2035.

Mais il faut aller plus loin

Développer l’industrie de défense européenne par des alliances entre acteurs est nécessaire. Il ne faut pas que par habitude, par peur, par besoin de réassurance, les Européens achètent à l’étranger s’adressant aux Etats-Unis. La Pologne par exemple est leader en matière de réarmement mais a acheté pour près de 20 milliards de dollars d’équipements à la Corée du Sud ou aux Etats-Unis ces dernières années. Le Royaume-Uni vient d’acheter 12 avions F35 aux Etats-Unis pour sa dissuasion nucléaire.

Le cas n’est pas unique on le sait.

Porter l’effort de défense à 5 % du PIB sera inutile si tout part en commandes pour l’industrie américaine de défense !

Là encore la Commission européenne pousse aux solutions européennes, la mutualisation, de même qu’elle vise à faciliter la création de nouvelles usines d’armement en allégeant les procédures réglementaires.

L’Association Jean Monnet a lancé début mai, avec ses partenaires, l’idée d’ UM SEGUNDO PLANO SCHUMAN: PARA A DEFESA COMUM E A UNIÃO POLÍTICA.

Il faut qu’elle se mobilise en ce sens. Car depuis l’échec de la communauté européenne de défense en 1954, la défense européenne a toujours été sous la coupe de l’OTAN.

Il faut maintenant un vrai pilier européen de l’Alliance mais un pilier conséquent avec des moyens de commandement et de planification, un budget conséquent.

Un monde qui change

Avoir une défense européenne signifie peser dans le monde qui est bouleversée par les crises et notamment contribuer à faire appliquer la Charte de l’ONU dont on a fêté le 26 juin les 80 ans avec son adoption à la conférence de San Francisco de 1945.

Je rappelle que la Charte de l’ONU dit dans son CHAPITRE PREMIER, article premier :

L’objectif de l’ONU est de : Maintenir la sécurité et la paix Internationales et, dans ce but, prendre des mesures collectives efficaces en vue de prévenir et d’écarter les menaces contre la paix, de réprimer les actes d’agression ou autres atteintes à la paix, et de procéder par des moyens pacifiques et conformes aux principes de la Justice et du droit international, à l’ajustement ou au règlement des conflits internationaux qui pourraient amener une rupture de la paix. Développer entre les nations des relations cordiales qui soient fondées sur le respect des principes de l’égalité des droits et de la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes. »

 » Tous les membres régleront leurs différents internationaux par des moyens pacifiques, de façon à ne pas mettre en danger la paix internationale, la sécurité et la justice. Tous les membres s’abstiendront, dans leurs relations internationales, d’user de menaces ou de recourir à la force pour attenter à l’intégrité territoriale ou a l’indépendance politique de tout État, ou d’agir de toute autre manière qui soit incompatible avec les buts des N’allons unies. Tous les membres donneront leur aide totale aux Nations unies dans toute action entreprise par elles conformément à la présente charte, s’abstiendront d’aider tout État contre lequel les Nations unies entreprendront une action préventive ou coercitive.

La Russie viole clairement la charte de l’ONU à laquelle elle dit adhérer.

Les différends armés internationaux se répandent comme une traînée de poudre à canon, il faut y faire face. L’armée européenne ou au moins des corps communs suffisamment étoffés est nécessaire, qui pourrait seconder ou remplacer l’OTAN si besoin d’autant plus que l’appui américain à l’OTAN est ambigu, voire incertain.

On pourrait imaginer aussi toutes sortes de coopérations militaires. Par exemple pourquoi ne pas mettre en commun les groupes aéronavals français, britanniques, italiens et espagnols plutôt que ne compter que sur le seul porte-avion français Charles de Gaulle qui est en plus indisponible une partie de l’année pour maintenance…

Il faut des projets dans les domaines du présent et de l’avenir comme les drones car les Américains sont très en avance sur nous. Ils ont déjà des drones de combat, alors qu’on en est à peine aux prototypes en Europe. Le retard est énorme, vraiment énorme …

Il faudrait aussi, et on l’évoquait en 2013 lors du colloque, un commandement européen permanent, un QG militaire à Bruxelles. Il faudrait aussi peut-être un fonds de défense mutualisé géré par la BEI…

L’avenir reste donc à écrire. Il faut penser d’abord à sauver l’Ukraine du désastre. Sauver et défendre l’Ukraine, on l’a compris c’est défendre l’Europe, son modèle unique et ses libertés.

Dans cette réflexion et cette action l’Association Jean Monnet a clairement un rôle à jouer.

Edouard Pflimlin

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